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Dina Oganova : rêves et révoltes d’une nouvelle Géorgie

Dina Oganova photographie sa Géorgie natale avec un amour viscéral, un incroyable sens de la narration et à travers le prisme de l’espoir tenace en l’avenir du pays. Alors qu’une nouvelle jeunesse ouverte vers le monde et prête à rejoindre l’UE est en train de s’exprimer à travers ses rêves et révoltes, la photographe nous en dit plus sur son travail. (Photo d’ouverture : © Dina Oganova)

La découverte des clichés de Dina Oganova est quelque chose de très envoutant en magnétique. Des personnages, des histoires, des récits se développent en une simple image en nous captivant comme un livre passionnant. Son travail nous parle de sa Géorgie natale, pays conservateur et encore opprimé par les visées d’expansion de la Russie, parcouru néanmoins par une vague libératrice et progressiste portée par sa jeunesse. Alors que la capitale Tbilissi est devenue une ville « de la mode », connue pour ses manifestations LGBT ayant été réprimées avec violence, la photographe nous raconte un pays farouchement tourné vers l’avenir.

© Dina Oganova
Peux-tu nous parler de ta carrière de photographe ? Comment as-tu abordé cet art ?

Pour être honnête, je ne me souviens pas du tout de moi sans la photographie et je dis toujours que je suis une personne très heureuse, parce que j’ai trouvé mon langage personnel pour parler aux gens, pour dire et montrer ce que j’ai à l’intérieur, ce que je veux changer, ce que j’aime et ce que je déteste, ce qui me fait pleurer ou me rend heureuse. Je n’oublierai jamais cette première photo et ce premier portrait d’une petite fille avec un énorme ballon qui, après plus de 20 ans, a découvert que c’était moi, mais c’est une autre histoire. En fin de compte, je pense que la photographie est pour moi le seul langage dans lequel je peux parler et être moi-même sans aucune frontière.

La Géorgie semble être sous le feu des projecteurs en ce moment : Les manifestations LGBT, Tbilissi et sa semaine de la mode, des créateurs comme Demna Gvasalia et de nombreux photographes talentueux… As-tu le sentiment que la jeunesse géorgienne ouvre sa voix ? Que penses-tu de ce mouvement ?

La situation des LGBTQ en Géorgie est malheureusement très difficile, surtout après le 5 juillet de cette année, qui devait être une fierté, mais qui s’est terminée par des attaques de groupes radicaux contre des journalistes et des militants. Le pays est encore très conservateur, mais je dirais que c’est plus à cause de notre mauvais gouvernement, qui est actuellement au pouvoir et qui s’appelle « Rêve géorgien », depuis presque 9 ans, et qui ne veut pas défendre les droits de tout le monde et en particulier ceux des LGBTQ. Mais nous avons des élections bientôt et nous espérons que tout va changer, quand un gouvernement de coalition va naître, parce que nous ne voulons plus qu’un gouvernement à parti unique soit au pouvoir, j’y crois.

© Dina Oganova

A propos de la nouvelle génération : Je les aime tous ! Je ne sais pas si vous avez vu mon projet intitulé « My Place » mais c’est tout sur eux, sur la jeunesse libre, la première génération née dans un pays indépendant. Nous sommes encore très jeunes, nous n’avons obtenu l’indépendance qu’en 1991 après l’effondrement de l’Union soviétique et je pense que cette génération, dont le certificat de naissance indique qu’elle est née à Sakartvelo et non en Union soviétique, ils sont le véritable avenir de mon pays bien-aimé, qui a d’abord été sous l’occupation soviétique et maintenant encore sous l’énorme occupation de notre voisin, la Russie.

J’aime beaucoup Demna Gvasalia (le directeur artistique de la maison de mode Balenciaga, ndlr), parce qu’avec son art (ses vêtements sont définitivement de l’art pour moi) il fait en sorte que le monde nous voit, nous, les gens de Géorgie. Ses collections, ce ne sont pas seulement des vêtements, c’est notre histoire passée et future, qui j’espère se fera dans l’Union Européenne, pour délivrer notre pays du joug de la Russie. Je pense que la génération Golder, comme je les appelle, portera ces idéaux et ces valeurs.

© Dina Oganova
Quel est le fil conducteur de ta série « I Am Georgia » ?

L’amour de mon pays. J’aime beaucoup la Géorgie, j’en aime chaque petit coin, chaque montagne et chaque vague de la magnifique mer noire, les gens, mais le plus important est que j’aime vivre ici. Je voulais montrer, présenter les gens de Géorgie à tout le monde, les amener partout et je suis très heureuse que la photographie me donne cette chance de voyager beaucoup et de parler de mon beau pays.

Peux-tu nous en dire plus sur la série « Girls from the Future » ?

Comme vous pouvez le comprendre d’après le titre, ça parle de filles (rires). Je voulais me concentrer sur elles, notamment après avoir travaillé avec l’UNFPA Géorgie sur un projet appelé « Silent Garden » qui concernait 25 000 filles disparues à cause de leur sexe (nous avons encore des problèmes, comme quand un couple va chez le médecin pour connaître le sexe de leur futur premier enfant et si c’est une fille, les femmes se font avorter, surtout pour ne pas perdre leur mari, leur partenaire, qui veut toujours avoir un garçon comme premier enfant). Je voulais me concentrer sur les filles, leurs rêves, leurs projets d’avenir, leur vie, tout simplement.

© Dina Oganova
Aurais-tu quelques conseils à nous donner sur la manière de développer une narration efficace en photographie ?

C’est une question très difficile pour moi, pour être honnête : je pense que le plus important est de faire quelque chose que vous voulez vraiment faire avec tout votre cœur et de parler de ce qui vit en vous.

Quel matériel utilises-tu dans ta pratique ?

J’utilise tout, de l’argentique au numérique. La photographie n’est pas une question de technique pour moi, c’est une question de photographe, de sentiments, d’intérêts, d’amour, de peurs, d’espoirs et de quelques autres petits trucs. Ce n’est pas un appareil qui fait une photo, c’est une personne qui se tient derrière n’importe quel équipement et sa personnalité.

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Source : Festival Circulation(s)*

 


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