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Montréal dans le viseur de Robin Cassiau

En 2016, le jeune photographe Robin Cassiau se rend au Canada, à Montréal. Ce séjour lui permet de constituer un carnet de voyage intitulé Shadows Journey. À travers cette série, il a choisi de montrer la ville sous l’angle de ses passants – presque toujours en mouvement. L’univers qu’il dépeint est fait de couleurs et de textures. Plus qu’une invitation au voyage c’est une observation discrète qu’il nous propose. Entretien. (Photo d’ouverture : Shadows Journey © Robin Cassiau)

Quand et comment es-tu devenu photographe ?

J’ai commencé à prendre mes premières photos lors d’un voyage aux Etats-Unis sur la côte ouest avec mes parents. Il y a maintenant 7 ans. Je m’étais acheté mon premier appareil photo numérique quelques mois auparavant. J’ai ensuite poursuivi des études de cinéma en Belgique à l’IAD jusqu’en 2012. On avait des travaux à faire en argentique (en diapositives), des sortes de romans photos pour apprendre le cadrage et raconter une histoire en une dizaine de photographies. Cette pratique est restée dans un coin de ma tête. J’ai ensuite commencé à être assistant caméra sur des tournages, puis j’ai de plus en plus pratiqué la photo de rue. En numérique d’abord puis j’ai voulu refaire de la pellicule. Mon niveau et mon approche photographique est devenue toute autre. Je n’ai plus arrêté depuis.

Quelle est ton approche de la photographie ?

Je fais des photos tous les jours. Je suis attiré par des ambiances, des expressions corporelles, des mouvements ou encore des personnalités. J’aime beaucoup me rapprocher des gens, de leur intimité. Ce que j’aime par-dessus tout, c’est la couleur. J’ai en tête le souvenir d’une femme noire vêtue d’un haut en velours bordeaux qui brillait au soleil. Je revois aussi une femme assise dans le métro, les ongles vernis en rouge tenant un livre à la couverture bleu foncé et une banderole de papier rouge assortie à ses ongles. Elle portait une veste en tweed vert clair qui faisait parfaitement ressortir sa chevelure rousse.
Quand j’arrive à mettre cela en image, jackpot ! Je suis très attiré par les textures aussi, les combinaisons de matières. J’aime beaucoup quand l’Homme se fond dans les décors. Peut-être que mes photos sont comme une salade bien décorée : plusieurs éléments de couleurs avec des textures et des goûts différents.

Quelle est l’histoire de cette série ?

J’ai fait cette série à Montréal pendant l’été 2016. Je suis allé valider mon Visa de travail là-bas. Comme à mon habitude j’ai fait des photos, sans vraiment avoir de projet en tête. Seulement continuer à photographier la ville.
J’ai beaucoup de photo de Paris, un peu de Londres, Viennes et Berlin. Je voulais dépeindre une autre ville, plus américaine. J’ai fait développer mes photos sur place et en revenant à Paris trois mois plus tard j’ai commencé à scanner ces photos. Ce n’est qu’une semaine avant mon exposition que nous – ma copine et moi – avons fait une réelle sélection par thème. On a ensuite trouvé ce fil conducteur ombre/lumière. Les personnages entrent et sortent à la manière des comédiens sur une scène de théâtre.

Shadows Journey © Robin Cassiau
Que cherches-tu à montrer à travers ton travail sur la lumière ?

La lumière me sert à magnifier les détails, les mouvements. L’ombre sculpte la photo en quelque sorte. Je trouve très important de jouer avec les deux. Même sans ombre apparente (ombres portées par exemple), je joue avec les silhouettes de passants. Les ombres me servent à composer un cadre et donner une impression d’une multitude de scènettes et de formes.

Aucun de tes sujets ne nous regardent, est-ce une caractéristique essentielle dans ta pratique de la photo de rue ?

Au Québec, les gens sont très protégés avec le droit à l’image. Ce n’était pas une mince affaire que de photographier à la volée ! Je me suis donc parfois mis à shooter de plus loin, à essayer d’être encore plus discret, et de pas trop regarder dans mon viseur. Au final, on lâche prise et on fait comme d’habitude, on croise les doigts pour éviter d’avoir une amende. La photographie de rue se base justement sur les personnes elles-mêmes. Ce sont les sujets. C’est notre but et notre grande passion à tous en tant que photographes de rue de témoigner de tout ce qui se passe dans le monde, d’errer à la recherche d’évènements incongrus. Aussi banale qu’une scène puisse l’être, la photographie permet de rendre ambigüe, cocasse ou contemplative des scènes de la vie quotidienne. C’est vrai que personne ne me regarde dans cette série. Ce n’est pas toujours le cas et c’est peut-être un heureux hasard si la sélection est comme ça.

Quelles ont été tes sources d’inspiration ?

Je n’ai pas eu d’inspiration conductrice pour ce travail. J’ai tellement de références et de visuels que ça ne compte plus vraiment. J’essaie d’être moi-même. Il ne faut pas photographier en pensant au travail de quelqu’un d’autre, ça ne marche tout simplement pas. Il faut se faire confiance et être aux aguets. Il faut suivre son instinct.

Des photographes favoris ?

Il y en a beaucoup ! Je citerai Joël Meyerowitz.  J’ai découvert quelques photos de Cape Light pendant mes études en Belgique, superbe. Il a été un des précurseurs de la photographie en couleur et l’a magnifié ! J’aime aussi Harry Gruyaert et ses incroyables tirages Cibachrome. Il y a aussi Gary Winogrand, Sergio Larrain, Claude Nori, Elliot Erwitt, Alex Webb, Willy Ronis… Ah oui ! Raymond Depardon aussi, bien évidemment ! Pour sa photographie intimiste, parfois fragile, parfois contemplative ou même timide (Manhattan Out). Son livre Errance m’a énormément inspiré. Un jour, j’ai posté une photo sur Facebook qui m’avait valu ma première comparaison à ce photographe français ! Et un dernier pour la route : Josef Koudelka, mystique, je le cite dès que je parle photo.

Quel boîtier, matériel utilises-tu ?

Plusieurs ! J’ai shooté avec mon Nikon FM2 équipé d’un 24 mm, un canon EOS 500 (boîtier argentique « électronisé ») monté d’un 28 ou d’un 35 mm et de temps à autre un Voigtlander Vito II monté en 50 mm. Ce dernier est entièrement manuel et très discret, mais son minuscule viseur rend le cadrage difficile.

Shadows Journey © Robin Cassiau
Peux-tu décrire cette série en trois mots ?

Je dirai… Veloutée, colorée, ambiance.

Des projets ?

Bien sûr ! J’en ai beaucoup en tête. Je dois finir mon premier projet photo commencé au Maroc. J’ai profité d’un voyage entre amis pour le commencer, sans idées de départ. Je m’étais laissé aller. J’ai utilisé une pellicule cinéma (c’était moins cher).
Arrivé sur place et j’ai commencé instinctivement à photographier en mode portrait. Je dois maintenant découper, trier, scanner, tirer… Et peut-être un tour du Canada ?

Pour découvrir le travail de Robin Cassiau : robin.cassiau.free.fr

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